lundi 11 novembre 2013

ANTARSYA, une force pour aller de l’avant









Au sujet des débats d'orientation d'ANTARSYA, le point de vue du SEK (Parti Socialiste des Travailleurs - IST), paru sur son site.


La conférence de l’Organe de Coordination Nationale d’ANTARSYA qui a eu lieu le samedi 2 novembre à Athènes a dû faire face à des questions nombreuses et importantes soulevées par les développements récents. Et en effet il y a eu, tant dans le rapport que dans la plupart des interventions qui ont eu lieu lors du congrès, des élaborations utiles quant aux tâches de la gauche dans les mouvements de grève et antifascistes.

Dans une conjoncture où des milliers de militants ont les yeux tournés vers les luttes cruciales comme l’ERT, les écoles, les hôpitaux, les universités, ANTARSYA dit qu’ « il nous faut insister sur la ligne du soulèvement ouvrier et populaire général avec pour objectif le renversement du gouvernement et de ses mesures, contre les « réalismes » qui invoquent constamment les « mouvements négatifs et l’absence de conditions » pour que les luttes vainquent ».

A un moment où les déclarations antifascistes de l’ensemble du spectre politique sont soumises à l’épreuve de la pratique, ANTARSYA dit clairement qu’ « il nous faut poursuivre et intensifier la lutte antifasciste pour que soit éradiqué le fascisme, ses soutiens sociaux, politiques et économiques… hors de la logique de l’ « arc constitutionnel »… », et fixe des revendications et initiatives précises dans ce sens.

De classe et internationaliste

A la veille de la présidence grecque de l’UE au premier semestre 2014, ANTARSYA endosse la possibilité d’ « une grande campagne qui montrera comment nous nous opposons sur une base de classe et internationaliste à l’UE. Car c’est un appareil d’austérité et de mémorandums qui vise à faire peser le poids de la crise des capitalistes sur les épaules des travailleurs et est de plus un appareil  raciste comme l’a montré le crime atroce de Lampedusa ».

Il est évident que de telles approches sont précieuses pour tous ceux qui mènent les luttes sur les lieux de travail et d’études, les syndicats, les quartiers et surtout politiquement.

Pourtant, parallèlement à ces clarifications sont apparus des problèmes importants autour des initiatives d’ANTARSYA pour une « collaboration » des forces de gauche en vue d’un plus grand soutien pour les batailles cruciales du mouvement.

Dans la dernière période, à travers des contacts et des rencontres, Le Comité de Coordination Central d’ANTARSYA a conçu et proposé à l’unanimité un « projet de déclaration commun » résumant le cadre et les objectifs de cette initiative et appelant « chaque organisation, chaque collectif, chaque militant et militante qui partagent les mêmes luttes et les mêmes buts à se regrouper ».

Malheureusement par la suite cette initiative s’est essentiellement limitée à un dialogue de sourds avec les forces du Plan B, lequel a répondu négativement dans une lettre dans laquelle il déclare que « pour le Plan B les propositions et idées exprimées dans le projet de déclaration commune que vous nous avez envoyé ne peuvent garantir une large adhésion ».

Chacun et chacune peut comprendre ce que « large adhésion » veut dire pour le Plan B à partir des interviews d’Alekos Alavanos dans les médias dans lesquels il s’adresse à une large audience. Dans Eleftherotypia du dimanche 26-27 octobre il prend pour exemple le New Deal de Roosevelt dans les années 1930 ou encore le Japon actuel qui « pour sortir non pas de la récession mais de la stagnation, double la circulation monétaire ».

Pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïtés sur le fait qu’il puisse s’agir d’un dérapage au cours d’une interview, soulignons que le Plan B dans sa lettre de réponse à ANTARSYA propose comme base commune de collaboration les « propositions du camarade Roussi ». Ces propositions incluent le point suivant : « 4. Sortie de l’euro et dévaluation contrôlée de la monnaie nationale comme un des outils sérieux pour exercer des politiques en faveur des classes populaires ».

Orientation anticapitaliste

Au point où en est arrivée la marche de l’état-major de SYRIZA vers la droite, les conceptions rappelant celles de Keynes constituent certainement des critiques de gauche. Mais cela de veut pas dire qu’ANTARSYA doive abandonner son orientation anticapitaliste pour adopter de telles conceptions.

L’augmentation de la circulation monétaire au Japon n’a pas apporté de nouveaux postes de travail mais de nouvelles bulles pour les spéculateurs. La dévaluation contrôlée de la monnaie nationale n’est pas une politique pro-ouvrière, c’est un outil pour stimuler la compétitivité des entreprises. Que celui qui oublie les expériences des travailleurs en Grèce à l’époque où la Drachme était gérée par la dévaluation contrôlée, regarde au moins les expériences actuelles des travailleurs en Argentine qui luttent pour quelque chose allant au-delà de la politique Kirchner.

De telles idées n’élargissent pas, mais au contraire réduisent la disponibilité des forces de gauche qui veulent aider la résistance ouvrière à vaincre. Ceci apparaît à partir d’une autre question.

Dans le journal du Plan B du 12 décembre 2012 Alekos Alavanos déclarait : « la conclusion centrale est que le dilemme de la monnaie a un rôle prépondérant dans l’immigration. L’euro rigide est une des raisons principales du grand flux en direction de notre pays ».

Pour ANTARSYA la rupture avec l’euro et l’UE est un affrontement avec un pilier du racisme, la forteresse de l’Europe Frontex qui a fait de la Méditerranée un cimetière de migrants. Le but de cet affrontement visant à briser les Accords de Schengen et de Dublin n’est pas de limiter le flux d’immigration ni d’expulser les immigrés hors de Grèce, mais d’ouvrir les frontières pour tous les travailleurs.

Ceci est une raison supplémentaire pour laquelle ANTARSYA ne peut reculer de sa position sur la rupture de classe et internationaliste avec l’UE. Les forces de la « gauche patriotique » risquent d’oublier qu’une grande partie de la classe ouvrière est constituée des immigrés et que le front de nos luttes s’élargit quand nous les avons avec nous.

Reculs

Malheureusement, alors que ces conceptions sont acquises dans ANTARSYA et que nous cherchons à en faire le patrimoine des forces du front commun, une tendance à la dérive s’est manifestée lors de la conférence de coordination nationale. C’est derrière la préoccupation de l’intervention dans les élections européennes avec le Plan B qu’a été répandue l’idée de la nécessité de former un cadre commun, avec des reculs d’ANTARSYA. Sur la base de cette priorité des propositions ont été émises visant à supprimer le caractère anticapitaliste du programme d’urgence transitoire, à ce qu’aucune mention ne soit faite des désaccords qui sont apparus, que disparaisse l’expression « dans un sens anticapitaliste, anti-impérialiste, internationaliste » de la thèse sur la rupture et la sortir de l’euro et de l’UE comme plateforme pour les élections européennes.

Malgré l’offensive agressive de camarades d’ARAN et ARAS en accord avec des camarades du NAR, aucune de ces propositions n’a rassemblé la majorité requise des deux tiers.  Ont été entendues des justifications disant que la question était purement tactique, et qu’une majorité augmentée n’était donc pas nécessaire. Ce qui ne peut bien évidemment être vrai quand est si fortement altérée la physionomie non seulement du front commun, mais d’ANTARSYA elle-même.

Notre avis est qu’ANTARSYA doit persévérer en ce qui concerne le reste des décisions communes pour les initiatives militantes, pour le soutien aux mouvements de grève et antifascistes et pour l’opposition à la présidence grecque de l’UE, et ne pas dériver vers la droite sous prétexte d’un partenariat électoral. Les membres d’ANTARSYA dans ses assemblées locales et dans les conférences à venir de ses instances peuvent et doit veiller à son caractère anticapitaliste à ce moment critique.

Panos Garganas, 6/11/2013